Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
marussie
7 février 2015

Petit parfum de guerre froide à la conférence sur la sécurité à Munich

Un vice-président américain qui dénonce les « pratiques barbares » de Vladimir Poutine, une chancelière qui rappelle le précédent du Mur de Berlin, un ministre des affaires étrangères russe qui attribue l’origine de la crise actuelle a l'« obsession des États-Unis » de vouloir « dominer l’Europe» depuis un quart de siècle : pour sa 51eme édition, la conférence de Munich sur la sécurité qui rassemble la fine fleur de la diplomatie mondiale, avait, ce samedi 7 février, un petit parfum de guerre froide.

Première a s’exprimer, Angela Merkel a prononcé un discours important, insistant sur l’engagement de ll'Allemagne sur la scène internationale mais expliquant pourquoi elle ne voulait pas livrer d’armes à l’Ukraine. « Je n’imagine pas une situation ou l'armée ukrainienne serait tellement équipée qu’elle impressionnerait la Russie » a expliqué Angela Merkel. « Militairement, ce conflit ne peut être gagne. C’est dur à dire mais c’est comme ça » a-t-elle ajouté. Pour elle, il faut donc « se concentrer sur une solution diplomatique et passer par des sanctions sur ce qui est notre point fort : l’économie ». Mais la chancelière a un débit plus rapide que d’habitude. Comme si elle était pressée d’en finir avec un discours qui n’était pas celui qu’elle aurait voulu prononcer. De retour de Moscou, elle aurait sans doute aimé pouvoir présenter un accord capable de mettre fin au conflit en Ukraine. Mais la chancelière a dû en convenir. Le succès de son déplacement spectaculaire avec François Hollande a Kiev et a Moscou est loin d être acquis. « Il n’y a pas de garantie que Poutine fera ce que nous espérons » a-t-elle reconnu. Certes, il n’est pas totalement exclu que la conversation téléphonique qu’Angela Merkel, François Hollande, Petro Porochenko et Vladimir Poutine doivent avoir ce dimanche débouche sur un accord mais personne ne semble vraiment y croire.

D’ailleurs, si l’on ne sait pas ce que Vladimir Poutine pense de cette médiation, Petro Porochenko est tout aussi énigmatique. Samedi, à Munich, il n’a soufflé mot du plan Merkel-Hollande, ce qui en dit long sur les réserves qu’il lui inspire. De son côté, le ministre russe des affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a eu, a Munich, quelques mots aimables pour l’initiative franco-allemande mais il s’est surtout montré extrêmement critique tant à l’égard du gouvernement ukrainien que de Washington. Il juge qu’en Ukraine, l’Union européenne « a soutenu un coup d’état » qui a débouché sur le départ du président Ianoukovitch. Il a également dénoncé « l’épuration ethnique » à laquelle se livrerait l’actuel gouvernement ukrainien, reprochant a l’Occident de ne pas réagir à « l’éradication des Juifs et des Russes » a laquelle on assisterait, selon lui, en Ukraine. Pour lui, la Crimée fait désormais partie intégrante de la Russie car les habitants l’ont décidé ainsi. Il a donc mis en avant « le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ». Et si l’on veut la paix en Ukraine, il faut que le gouvernement de Kiev négocie avec les représentants des régions de l’est, a-t-il dit, ceux-là même que le président ukrainien qualifie de « terroristes ». Le ton de l’intervention de Sergueï Lavrov, son contenu mais aussi la tension qui régnait dans la salle : tout indique que l’on est à nouveau dans une phase de confrontation durable entre la Russie et l’Occident.

Angela Merkel et le vice président américain Joe Biden, le 7 février.

Joe Biden, le vice-président américain, n’a rien fait pour démentir cette impression. Selon lui, l’administration Obama a, des 2009, beaucoup fait pour « avoir des relations constructives avec la Russie » mais « depuis 2012, le président Poutine a choisi une autre voie ». Rappelant que les frontières sont inviolables et que « chaque nation a le droit de choisir ses alliances », Joe Biden a dit « ne pas croire à une solution militaire en Ukraine mais la Russie n’a pas le droit de faire ce qu’elle fait et le peuple ukrainien a le droit de se défendre ». Faut-il donc livrer des armes à l’Ukraine ? Comme le commente Norbert Röttgen, président de la commission des affaires étrangères au Bundestag : « Biden n’est pas allé jusqu’au bout de sa démonstration mais tout son raisonnement conduit a une telle conclusion ». Dans les milieux gouvernementaux allemands, on craint donc que la pression à Washington soit telle que le président Obama -qui recevra Angela Merkel a la Maison blanche lundi- va avoir du mal a résister. Et même si l’envoi d’armes est symbolique, il permettrait, selon l’Allemagne, a Vladimir Poutine d’armer encore plus lourdement les séparatistes. Un scénario noir face auquel l’Union européenne aura le plus grand mal à rester unie. Ce n’était donc pas seulement parce qu’elle était fatiguée qu’Angela Merkel était sombre samedi matin mis bel et bien parce que l’Allemagne ne voit pas d’issue à ce conflit à sa porte. Bien au contraire.

 

Publicité
Publicité
Commentaires
marussie
Publicité
Publicité